La mêlée
1973

Martine Doytier, « La Mêlée », 1973, huile sur toile, 73 x 92 cm.
Collection Frank Horvat. Inv. MD03

À l’extrémité d’une route qui traverse un petit village de campagne, se tient une étrange scène, intitulée La Mêlée, au cœur d’une jungle qui aurait pu être peinte par le Douanier Rousseau.

Un enchevêtrement de bras et de jambes, de visages effrayés, de bouches hurlantes et de corps tordus nous entraîne au cœur d’une bataille désordonnée. Entourant un homme d’Église, dépassé par la situation, s’amasse une quinzaine de personnages en uniforme. Pantalon gris, bottes marron, gilet sans manches bleu foncé et pull bleu composent la tenue de cette turbulente équipe.

Ce sont peut-être les élèves d’un pensionnat catholique pour garçons qui profitent d’une sortie à la campagne pour se défouler en lançant une belle bagarre à laquelle le Frère supérieur n’a pu échapper. On s’y baisse le pantalon, on s’y mord les doigts et on se donne des coups de pied dans le nez. Certains tentent de s’échapper, un autre semble évanoui et la peur se lit sur plusieurs visages.

La bataille tourne mal et dégénère un peu. On n’en saisit pas véritablement le sens, si ce n’est pour donner libre cours au défoulement, aux instincts de violence ou pour venger de vieilles rancunes.

Est-ce là une image du monde que nous propose Martine ? Violent, irrationnel, difficile à maîtriser et aux querelles inutiles et incompréhensibles. Cette Mêlée dans la jungle serait celle qui anime notre société et que certains, au visage apeuré, tentent de fuir. Ce monde, proposé par Martine, est donc réduit à une puérile bataille à mains nues à laquelle l’Église n’aurait d’autre remède à proposer que de lever ses yeux vers un ciel bien nuageux.