Martine Doytier, « Un dimanche à la campagne », 1971, huile sur toile, 55 x 80 cm.
Collection Jean Ferrero, Nice. En dépôt à L’Artistique, Donation Jean Ferrero, Nice. Inv. MD36.
Une nouvelle fois, avec Un dimanche à la campagne, Martine Doytier montre son intérêt pour les peintures du Douanier Rousseau. Martine connaissait personnellement Henri Certigny, le biographe d’Henri Rousseau et peut-être est-ce lui qui lui a fait connaître ses œuvres.
C’est, en effet, une œuvre d’Henri Rousseau datée de 1908, La Carriole du Père Junier, qu’elle prend comme modèle pour peindre une famille en promenade. Ici, tout fait référence directement à ce tableau : le cheval pommelé est identique à celui peint par Rousseau, même crinière sur les yeux, mêmes œillères noires, même pelage et même position des pattes. Aucun doute, Martine avait la reproduction de cette œuvre sous les yeux lorsqu’elle peignait. Elle ne s’en cache pas, elle aime Henri Rousseau et le montre en le copiant. Elle est toutefois plus maladroite que lui car elle oublie de peindre l’un des roues de la carriole. Mais peu importe, même le petit chien noir est présent.
La famille qui se promène en carriole est campée bien de face, comme celle du Douanier. Mais les personnages sont déjà des « Doytier » et tous leurs visages sont construits sur le même principe. Ils ont les yeux noirs bien ronds et cernés de noir, des joues rubicondes, des lèvres ourlées et pincées d’où tout sourire est absent, des sourcils fournis et des moustaches aux pointes effilées. La marque de fabrique est trouvée. Elle va s’affiner et se préciser tableau après tableau et Martine aura vite fait – le temps de quelques peintures – de préciser toutes les caractéristiques de son style unique.
Quant à la composition générale, elle devient plus complexe. Un village avec clocher à girouette donne de la profondeur à l’arrière-plan, des personnages aux poses variées animent les différentes scènes et le petit quadrillage noir et blanc qui apparaît sur le pantalon du pique-niqueur de droite est un motif que l’on retrouvera bien souvent par la suite.
Martine a encore du travail à fournir pour maîtriser le dessin en perspective. La nappe rouge le démontre, tout comme le dessin des feuillages et celui des petits arbres ronds. Mais chaque chose en son temps. C’est à la naissance d’une artiste que nous assistons, l’entreprise est d’envergure, laissons-lui le temps !